Dans la brousse du Nord-Ouest, les carrioles étaient fabriquées sur place. Généralement,
elles étaient construites d'après l'usage que l'on en ferait et
du matériel étant disponible. La largeur et la longueur dépendaient
des sentiers que l'on utilisait. Les sentiers serpentant entre les
arbres étaient une contrainte pour des carrioles trop longues, car une
traîne de plus de 4 ou 5 mètres était très difficile à manoeuvrer
dans les virages serrés. Les sentiers auraient pu être élargis, mais
cela exigeait plus de travail, et en fin de compte il fallait faire un
compromis entre la longueur de la carriole et le travail nécessaire
pour élargir le sentier. Un autre aspect qui entrait en jeu était la
difficulté à trouver du bois de taille pour faire des carrioles plus
longues et larges.
Le
constructeur de la carriole devait connaître à fond la brousse où
elle serait utilisée. Des sentiers de trappeurs éloignés des routes
principales étaient ouverts par le chasseur trappeur, qui était aussi
le conducteur d'attelage de chiens ou le musher. Ces
sentiers suivaient les accidents de terrain, contournant des arbres, des
touffes de tourbe, des bouquets de saules et des fourrés denses. Les
carrioles plus longues devaient être très soigneusement menées par le
conducteur pour éviter qu'elles ne s'accrochent sur des obstacles
le long du sentier. Le chasseur trappeur ne coupait ou retaillait que
dans les halliers les plus épais, et ceci pour permettre aux carrioles
de longueur normale de passer à travers. Dans ces endroits de végétation
dense, il arrivait que les virages étaient si serrés que le conducteur
ne voyait plus le chien meneur.
La
carriole était vraiment un récipient monté sur une plate-forme sur la
neige. La plate-forme était courbée à l'avant et avait des côtés
verticaux à l'arrière. Une plate-forme de carriole typique
comprenait deux planches d'environ 5 mètres de long et de 250 mm de
large, pour une largeur totale de 500 mm. Il y avait trois sections dans
la longueur totale: (a) la volute à l'avant, (b) la surface
principale où l'on mettait le chargement, et (c) un espace où le
musher pouvait se tenir à l'arrière.
Les
bâtisseurs traditionnels utilisaient du bois du pays, soit de l'épinette
rouge ou de bouleau. Le mélèze était le bois de préférence. Désigné
par les botanistes comme du mélèze, il est connu dans la culture
indienne comme étant du «bois franc indien». Dans le Nord, c'est le
seul conifère qui perd ses aiguilles à l'automne. Au printemps, ses
nouvelles aiguilles, d'un vert délicat, voisinant avec les jeunes
pommes de conifère rougeâtres, donnent à cet arbre un charme élégant
qui agrément le feuillage des boisés. Le fil de ce bois est souvent
tordu, mais l'on peut trouver des arbres droits, et c'est avec ces
derniers que l'on doit construire les carrioles. Le «bois franc
indien» est très endurable et est bon pour la plate-forme du toboggan
puisqu'il résiste au terrain rêche, glacé et cahoteux même en
plein chargement.
Traîner
des carrioles lourdement chargées se révélait être un travail pénible,
et les chiens -comme leurs maîtres - avaient besoin de
s'alimenter régulièrement. On avait coutume de ne donner à manger aux
chiens qu'une fois par jour, et ceci se faisait à la fin de la journée.
Par contre, un petit goûter de morceaux de gras et d'un peu de poisson
ou de viande leur était donné le midi pour leur donner suffisamment d'énergie
pour terminer leur journée. On ne donnait le gros repas aux chiens que le
soir après la journée de travail pour deux raisons. En les nourrissant
le soir, ils se relaxaient, se reposant pour la nuit et semblaient être
plus alertes le matin pour commencer leur travail. Une autre raison à
cela était que les chiens avaient tendance à prendre des «pauses
toilette» après avoir mangé. Par conséquence, une alimentation
matinale occasionnait autant de pauses qu'il y avait de chiens, et dans
chaque cas il fallait déplacer la carriole pour ne pas salir le fond de
la traîne pour éviter de gêner le glissement. De plus, salir de cette
façon le dessous de la carriole augmentait la résistance avec la neige
et rendait le travail des chiens encore plus dur. C'était irritant pour
le conducteur de chiens, qui devait s'arrêter et gratter le fond du
toboggan pour le nettoyer. Généralement, en soignant les chiens le soir,
ils devaient s'arrêter moins souvent pour faire leurs besoins.
Les
chiens de traîneaux étaient nourris de poisson, de volaille ou de
viande, gelés ou séchés, cuits ou crus. Durant les voyages, il était
préférable d'avoir du poisson sec ou de la viande séchée, en raison
de leur légèreté. Lors d'un jour de pêche ou de chasse, du poisson
frais ou de la viande était donnés. Mais au lieu d'avoir à donner des
produits frais de la chasse l'hiver, la plupart des chasseurs et des
trappeurs préféraient prendre du poisson vers la fin de l'été et à
l'automne et le faire sécher pour la nourriture d'hiver.
La plupart des chiens de traîneau n'étaient utilisés que pour le
travail. Ils n'étaient pas des animaux de compagnie et n'étaient pas
très gentils les uns envers les autres. Ils avaient une tendance, qui est
bien naturelle chez les canidés, à attaquer si leur nourriture ou leur
territoire étaient menacés. C'est ainsi que généralement les chiens
étaient toujours attachés, souvent avec une chaîne, à la maison
principale, et lors des voyages et des bivouacs de nuit. Cette règle était
suivie de près, surtout lorsqu'il y avait d'autres chiens dans la région.
On ne les laissait jamais en liberté.
Il
fallait prendre des précautions lorsque l'on approchait un chien. Si le
chien se faisait approcher par un étranger, et parfois même par son maître,
il fallait faire attention et donner le temps à l'animal de voir et de
sentir la personne ou sa main. Une fois que cela était fait, le chien
pouvait généralement être touché sans danger afin de mettre ou enlever
les harnais, cela sans qu'il morde. Les chiens de traîneau n'étaient
pas forcement mauvais, mais ils étaient des animaux de travail, et non
des animaux de compagnie.
Un bon attelage de chiens de traîneaux a
toujours un bon chien meneur. Le chien à l'avant de l'attelage était
celui qui entendait les ordres du maître et agissait en conséquence. Il
sentait les changements de rythme des chiens derrière lui, et ajustait
rapidement son allure pour garder la même vitesse. Un chien meneur bien
dressé savait tourner aux ordres de son maître et pouvait même revenir
sur ses pas. Il contournait les obstacles tels que les arbres et les
roches. [suivre]
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