Description de site: Lac La Biche Mission
En 1798, David Thompson implanta un poste de traite des fourrures au lac La Biche pour le compte de la Compagnie du Nord-Ouest. Il avait choisi cette localisation parce que le portage du lac La Biche permettait une connexion entre les systèmes hydrographiques de la Saskatchewan et de la rivière Athabasca - en d'autres termes, entre le bassin versant de la baie d'Hudson et celui de l'océan Arctique. La situation stratégique de ce poste ne tarda pas à y attirer la concurrence de la Compagnie de la Baie d'Hudson. Peter Fidler créa Greenwich House pour la Compagnie de la Baie d'Hudson en 1799, près du poste de Thompson. Ce voisinage fut intéressant, mettant côte à côte deux des plus célèbres traiteurs, les plus importants parmi ceux qui remplissaient les blancs des cartes géographiques dans le cadre de la traite des fourrures.
Plusieurs postes furent construits puis abandonnés au lac La Biche jusqu'en 1823, mais cette région avait peut-être plus d'importance encore pour le groupe de Métis qui s'y était installé et qui constituait une communauté plus ou moins permanente. Ils chassaient et piégeaient pour leur propre compte, certains se lançant également dans la traite indépendante, en achetant des fourrures à différents groupes amérindiens pour les revendre à la Compagnie de la Baie d'Hudson. Plusieurs missionnaires catholiques visitèrent le lac La Biche au cours des années, et même si la Compagnie de la Baie d'Hudson y avait fermé son poste en 1823, le père Lacombe pensa qu'il serait approprié d'y implanter une mission, d'autant plus qu'il se trouvait déjà une mission méthodiste à proximité, au lac Poisson Blanc.
La Compagnie de la Baie d'Hudson y rouvrit son poste en 1852-1853 et, au printemps 1853, le père Remas y fonda également une mission. Celle-ci serait plus tard officiellement nommée Notre-Dame-des-Victoires. Le premier site choisi pour la mission ne convenant pas tout à fait, un nouvel emplacement fut choisi en 1855, dans une anse au nord-ouest de la petite ville actuelle de Lac La Biche. Vers 1856, une petite communauté missionnaire y était installée.
En plus de desservir la population locale composée de Métis et de Cri, la mission du Lac La Biche avait également une fonction pratique. Elle servait d'entrepôt et de centre logistique de transport pour les missions oblates de tout le nord de l'Alberta et de ce qui deviendrait les Territoires du Nord-Ouest. En plus des routes fluviales et des portages qui reliaient les systèmes de la Saskatchewan et de la rivière Athabasca, des pistes de chariots reliaient le lac La Biche aux principales pistes carrossables s'étirant depuis Fort Garry jusqu'à Fort Edmonton à travers les plaines. Une ferme et d'autres entreprises furent également implantées en ce lieu pour l'entretien de la mission.
Dans le courant de la décennie 1860, Notre-Dame-des-Victoires était une mission plutôt prospère. Les activités de la ferme produisaient suffisamment d'excédents de farine et d'autres denrées pour pouvoir alimenter les missions moins fortunées. La mission jouait également un rôle vital dans la gestion et l'entreposage des biens destinés aux missions les plus éloignées. À l'instar du système en usage pour les postes de traite des fourrures, les missions utilisaient elles aussi des entrepôts de stockage du fret devant être transporté par voie fluviale vers les postes distants de l'intérieur. À la suite des pères oblats, un groupe de sœurs grises arriva en 1862. Peu après, la mission ouvrit une école. La communauté vivant aux abords de la mission continua de croître, de plus en plus de familles s'installant sur les terres entourant le lac.
Vers les années 1880, le volume des biens transitant par la mission de Notre-Dame-des-Victoires était tel qu'il mettait le système à rude épreuve. De plus en plus souvent, des marchandises devaient être laissées en arrière, parce qu'il n'y avait plus de place sur les chariots, les bateaux et les barges en charge du ravitaillement des missions. L'arrivée du chemin de fer Canadien Pacifique à Calgary en 1883 permit une alternative à moindre coût pour transporter les biens vers l'ouest avant que les chariots ne les apportent à Edmonton. Cette nouvelle route pouvait éviter le lac La Biche et, vers 1900, l'essentiel du fret destiné aux missions du nord voyageait jusqu'à Edmonton, puis jusqu'à Athabasca Landing, avant d'être transporté vers le nord par bateau.
Son rôle logistique ayant diminué, la mission se concentra plutôt sur sa fonction spirituelle, d'enseignement et autres services qu'elle fournissait localement aux Métis et aux communautés des Premières nations. Vers les années 1870, l'école s'était agrandie pour inclure une résidence permettant de loger des pensionnaires. Par exemple, en 1871, seize enfants vivaient à la mission et y suivaient la classe, tandis que cinq autres venaient également à l'école en tant qu'externes. Malgré des hauts et des bas, l'école continua de se développer et elle était encore en activité en 1963. L'un des aspects intéressants de la mission est son activité d'édition. En 1877, Émile Grouard y avait rapporté d'Europe des caractères d'imprimerie syllabiques et une petite presse, et la mission devint un centre d'édition de matériel religieux en caractères syllabiques cris et Chipewyan. C'est à la mission que furent produits quelques-uns des tout premiers livres publiés dans ce qui serait plus tard l'Alberta.
La mission présente d'intéressants aspects de l'évolution des communautés du nord de l'Alberta. Bien qu'il ait été implanté pour servir les intérêts de la traite des fourrures, le poste du lac La Biche se transforma en petite mission se battant pour sa survie - située en ce lieu pour desservir les familles métis et amérindiennes qui s'étaient installées autour du lac pour la seule raison de sa situation stratégique dans la traite des fourrures. La mission se développa au-delà de ses activités évangéliques pour proposer son enseignement scolaire et d'autres services - y compris une maison d'édition, un moulin à farine et des services d'affrètement. Bien qu'elle se situe aujourd'hui à l'extérieur des limites de la ville moderne de Lac La Biche, elle fut réellement à l'origine de cette communauté.
Les fêtes commémoratives des Métis à Lac La Biche ont récemment été présentées dans Alberta Connections, le magazine du développement communautaire en Alberta, article mis en ligne sur le site Alberta Heritage Online.