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L’Ouest Canadien

Le journal
Frédéric-Edmond Villeneuve (1867-1915)

Ce journal fut publié à Edmonton, dans les Territoires du Nord-Ouest, au temps de la ruée vers l’or du Klondike (1898-1900). Ce fut le premier journal d’expression française dans ce qu’allait devenir l’Alberta. Le rédacteur en chef et propriétaire du journal était un avocat d’Edmonton originaire de Montréal, Frédéric-Edmond Villeneuve. Arrivé avec l’abbé Morin en 1897, il prit peu de temps à faire sa marque dans la région.

Frédéric Villeneuve savait que ce ne serait pas facile d’entreprendre la publication d’un journal français à Edmonton. Dans l’éditorial du premier numéro du journal, il s’exprime ainsi :

Publier un journal dans les Territoires du Nord-Ouest, où la population canadienne est encore si faible, est peut-être de notre part, une entreprise téméraire; mais comptant sur la bienveillance de nos compatriotres, et sur le bon vouloir des amis de la colonisation, nous avons confiance dans notre oeuvre1.

Publié à 900 exemplaires2 le jeudi, L’Ouest Canadien avait quatre pages dont la deuxième et la troisième contenaient les informations locales, régionales et internationales. Le journal avait une largeur de cinq colonnes et était rempli d’annonces de commerçants locaux et québécois. Quelques publicités prenaient deux colonnes.

L’abonnement, que les lecteurs ne payaient pas toujours à temps, était de un dollar par année, payable d’avance3. Les petites annonces (5 lignes et moins) coûtaient $1.00 pour trois insertions ou 10¢ la ligne la 1ère insertion et 5¢ les suivantes. Pour les annonces permanentes, il fallait s’adresser au journal et le client devait d’abord s’abonner à L’Ouest Canadien.

Frédéric Villeneuve s’associa à quatre autres personnes pour former «La Compagnie d’imprimerie Canadienne d’Edmonton Limitée»: Joseph E. Laurencelle, gérant de la Banque Jacques-Cartier, Jean-Baptiste Morin, missionnaire-colonisateur, Joseph Cartier, commis à la Banque Jacques-Cartier (tous d’Edmonton) et Eugène Villeneuve, marchand, de Montréal. Le capital de l’entreprise était de $2 500 divisé en 2 500 parts de un dollar chacune.

Il ne fait aucun doute que le journal L’Ouest Canadien était important pour la communauté francophone de toute la région; il était en fait le mur sur lequel la population francophone s’appuya pour «la défense des intérêts français et catholiques des Territoires (...) nous avons élevé la voix pour défendre nos intérêts, nos droits lorsqu’ils étaient attaqués»4.

À la parution du premier numéro de L’Ouest Canadien, les journaux du pays saluèrent le nouvel hebdomadaire par des mots d’encouragement. Le Edmonton Bulletin accueillit le nouveau journal en ces termes :

The first copy of L’Ouest Canadien, Edmonton’s new French journal, made its appearance in the journalistic arena on Friday. The new magasine is a five column four page weekly publication, replete with local news and well patronized by outside as well as local merchants. It has an able editor in the person of Frederic Villeneuve, late of Montreal.5

L’entreprise naquit dans des conditions difficiles. Le rédacteur en chef l’indique dans son premier éditorial :

Nous n’avons pas d’argent, mais nous demandons à chacun de nos lecteurs de faire de la propagande pour notre journal. Lorsque l’organisation de notre imprimerie sera plus complète, nous croyons être en mesure de donner à nos lecteurs et abonnés un journal intéressant et vraiment utile à l’oeuvre de la colonisation dans ce beau district de l’Alberta6.

En mai 1898, Villeneuve annonçait la nouvelle suivante: « L’Ouest Canadien a déménagé ses ateliers sur la rue qui longe la côte, en arrière de la Banque Jacques-Cartier; le bureau est toujours dans la Bâtisse Gallagher »7.

Il n’était pas facile de produire un journal de qualité à chaque semaine. D’autant plus que Villeneuve était avocat et notaire, ce qui ne lui laissait pas beaucoup de temps pour faire autre chose.

Le personnel du journal était réduit au minimum. Pendant la campagne électorale de l’automne 1898, la publication de L’Ouest Canadien fut suspendue « pour permettre à notre directeur l’opportunité d’aller visiter plus en détail les différentes localités »8. En effet, Villeneuve était candidat aux élections territoriales dans la circonscription de Saint-Albert. Il devait remporter la victoire contre Dan Maloney.

En mai 1899, le journal s’excusa auprès de sa clientèle en ces termes: « La suspension du journal pendant les deux dernières semaines n’est pas le résultat de la mauvaise volonté de la part de la rédaction ou de l’administration »9.

En septembre 1899, le journal déménagea dans de nouveaux locaux10 situés sur l’avenue Jasper, côté sud, entre les rues McDougall (100 rue) et First Street (101 rue). Quelques semaines plus tard, le journal annonçait que « l’abbé Morin était rappelé à Montréal »11 et cessait d’être prêtre-colonisateur pour l’Ouest.

En décembre 1899, un « numéro spécial imprimé à 2 500 exemplaires avait été publié pour être distribué à ceux qui désireraient des renseignements sur le pays »12. Ce fut la dernière tentative pour attirer vigoureusement des colons dans la région. Quelques mois plus tard, après plusieurs avis demandant aux lecteurs de payer leur abonnement dû, l’édition du 22 février 1900 allait être la dernière. L’éditorial du jour nous en donne les principales raisons :

La population française et catholique n’a pas compris suffisamment l’importance d’avoir, pour défendre ses intérêts les plus chers, un journal dévoué qui, tout petit qu’il ait été, a rendu de grands services pour faire connaître notre pays, pour attirer sur lui l’attention du colon, et qui, à l’occasion, a su prendre en main et vaillamment la défense des intérêts français et catholiques des Territoires13.

En remerciant ses collaborateurs et annonceurs, Frédéric Villeneuve affirma qu’il sortait de cette entreprise la tête haute :

Nous croyons avoir rempli notre programme à la lettre. Indépendant des partis politiques, nous avons «rendu à César ce qui était à César»; nous avons élevé la voix pour défendre nos intérêts, nos droits lorsqu’ils étaient attaqués et nous sommes convaincus d’avoir fait en tout temps notre devoir. Cependant le succès n’a pas répondu à notre attente14.

L’initiative de Frédéric Villeneuve et de la Société de Colonisation d’Edmonton n’était pas viable en pays de colonisation; il a quand même le mérite d’avoir relevé le défi.

Frédéric-Edmond Villeneuve (1867-1915)

Frédéric-Edmond Villeneuve naquit à Montréal le 6 mars 1867. Il fut des études en droit et fut admis au barreau du Québec le 16 janvier 1891. Il pratiqua son métier à Montréal avant de venir s’établir en Alberta en 1897.

Il s’installa à Edmonton et ouvrit un bureau dans la Bâtisse Gallagher, à côté des bureaux du journal L’Ouest Canadien. Pendant son séjour à Edmonton, il résidait à l’hôtel Queen’s, situé à deux rues de la Bâtisse Gallagher. Il ouvrit aussi un bureau à Saint-Albert où il se rendait le samedi matin. Il occupa aussi des fonctions importantes dans la communauté francophone, d’abord étant élu premier vice-président et ensuite celui de président de la Société Saint-Jean-Baptiste en 1898 et 1899 successivement.

Son intérêt pour la population de l’Ouest le porta à la politique et il fut élu à la Législature des Territoires du Nord-Ouest à Régina le 4 novembre 1898. Il l’emporta sur ses deux adversaires. Les paroisses de Saint-Albert, Morinville, Hamel et Saint-Pierre votèrent en sa faveur. L’autre fonction publique dont il fut chargé fut celle d’assistant-commissaire pour le recensement dans le Nord-Ouest en 1901.

Il fut hospitalisé une première fois en novembre 1899, souffrant de rhumatisme inflammatoire15. En 1901, son père était mourant à Montréal; il dut y faire quelques voyages, notamment pour son testament. En avril 1902, il fit part de son intention de se retirer de la vie politique pour aller demeurer définitivement à Montréal. Il appuya le candidat Richard Secord à l’élection du 21 mai 1902 alors que Daniel Maloney fut élu par six voix de majorité. Il quitta Edmonton en juin 1902.

Une fois à Montréal, il fut entre autre conservateur de la bibliothèque de 1909 à 1915. Pendant son séjour à la bibliothèque municipale, il se montra à la hauteur de la situation, en faisant l’acquisition d’une importante collection de livres, la collection Gagnon. Il se laissa encore une fois tenter par la politique et il se présenta comme candidat indépendant dans la division de Maisonneuve aux élections fédérales de 1908.

Il mourut à Montréal le 23 avril 1915. Il était marié à Louise Howie. En 1905, lorsque la paroisse de Saint-Pierre, près d’Edmonton dût choisir un nom pour son bureau de poste, on adopta le nom de Villeneuve.

1 L’Ouest Canadien 03.02.98:1.
2 Lowes Directory.
3 Vers la fin de la seconde année de parution, à en croire les dires du directeur Frédéric Villeneuve, de nombreux clients n’avaient pas payé un sous de leur abonnement.
4 L’Ouest Canadien 22.02.00:2.
5 Edmonton Bulletin 07.02.98:1.
6 L’Ouest Canadien 03.02.98:2.
7 L’Ouest Canadien 12.05.98:3.
8 L’Ouest Canadien 20.10.98:3.
9 L’Ouest Canadien 18.05.99:3.
10 L’Ouest Canadien 14.09.98:3.. Les nouveaux locaux étaient situés sur le côté sud de l’avenue Jasper, en face de la 100 a Street. À la fermeture du journal, l’immeuble devint leVictoria Hotel , propriété de messieurs Corriveau et Cloutier; l’hôtel, à l’époque, avait une annexe qui deviendra la «Union Bank» devenue depuis «Union Bank Inn», sur l’avenue Jasper.
11 L’Ouest Canadien 21.09.99:3.
12 L’Ouest Canadien 07.12.99:2.
13 L’Ouest Canadien 22.02.00:2.
14 L’Ouest Canadien 22.02.00:2.
15 Edmonton Bulletin 18.12.99:1.

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