Lors
de la première visite d’un missionnaire catholique au lac la
Biche, en 1844, par M. Jean-Baptiste Thibault, une communauté
dynamique y est confortablement installée, et ceci depuis
presque cinquante ans1. Les missionnaires itinérants feront plusieurs visites à
cette localité où habitent plusieurs familles de quelques
anciens voyageurs, Joseph Cardinal et Jean-Baptiste Desjarlais
et autres, qui s’y étaient fixés. On y récoltait des
pelleteries, allait à la prairie pour chasser le bison et
pêchait le poisson abondant du grand lac.
Les Oblats ne faisaient que débuter leurs efforts
d’évangélisation dans le Nord-Ouest, lorsqu’ils commencèrent à
avoir de sérieux problèmes de transport avec la Compagnie de la
Baie d’Hudson qui offrait gratuitement le passage. C’est qu’avec
l’augmentation constante du nombre de religieux qui se rendaient
aux missions du Grand Nord, principalement dans le bassin du
Mackenzie, il devenait essentiel de trouver une autre solution
car les facteurs de la CBH devaient absorber ces frais. Mgr
Alexandre Taché, devenu évêque du diocèse de Saint-Boniface en
1851 et chargé du vicariat de l’Athabaska-Mackenzie, ayant passé
plusieurs années en aval de la rivière Athabasca dans les
missions du Grand Nord, eut l’idée de vérifier si la rivière
était vraiment si infranchissable qu’on le croyait, car en
faisant transporter des marchandises au lac la Biche dans une
première étape, et le printemps suivant, une deuxième équipe les
descendraient jusqu’aux missions du Nord, ce serait une solution
au problème. En plus, le chaleureux accueil que les
missionnaires avaient eu de la part des Métis du lac la Biche,
donnait espoir à Taché que ce ceux-ci seraient disponibles pour
fournir une main-d’œuvre abondante pour les travaux de la grande
ferme qu’il proposait pour la mission, ainsi que pour le
transport terrestre et riverain, et peut-être même pour des
vocations religieuses.
Après avoir descendu la rivière Athabasca en canot sans grands
problèmes en 1856, Taché aimait dire qu’elle était « le grand
épouvantail du Nord », et il mit son plan en action. Une mission
permanente est établie au lac la Biche et quelques individus et
leurs familles y migrent de la Rivière-Rouge pour travailler
pour la mission et aider à sa création. Dans la communauté,
certains des gens trouvent de l’emploi saisonnier à la mission,
tout en vaquant à leurs diverses occupations. Ils devaient
souvent s’éloigner, mais petit à petit, et ceci surtout après la
disparition du bison en 1876. Entre temps, il se consolide une
équipe spécialisée dans le maniement des bateaux sur la rivière
Athabasca, qui, en passant, était loin d’être placide, malgré
les dires de Taché. Au début, on avait essayé des canots, mais
très vite, ont constate que des embarcations solides et plus
grandes sont nécessaires, comme le bateau d'York. Mais la clé
essentielle à la navigation de l’Athabasca est la découverte
d’un chenal qui contourne le pire des Grandes Rapides, par un
des bateliers, Louison Fosseneuve, d’origine de la
Rivière-Rouge, qui leur permet d’éviter le plus grand danger.
Après sa découverte, Fosseneuve est connu sous le sobriquet de « Shot »,
pour son exploit d’avoir sauté les rapides. Ce ne fut pas long
avant qu’un commerce de fourrures avoisinant de la mission se
fasse construire une « berge » pour supplanter le bateau de la
mission, et se lance à son tour dans le trafic riverain vers la
Rivière-la-Paix via le Petit lac des Esclaves, ainsi que vers
Fort McMurray, la mission de la Nativité et le fort Providence.
Enfin, la CBH décide de monter un bateau à vapeur sur la rivière
Athabasca, et les directeurs s’adressent aux administrateurs de
la mission du lac la Biche pour emprunter leurs hommes
d’expérience. Après, le trafic se fera d’Athabasca Landing, et
les gens du lac la Biche trouveront facilement du travail sur la
rivière, certains comme capitaine, d’autres halant des bateaux à
contre courant et déchargeant les péniches, car à cette époque
tout ne se faisait pas à la vapeur. Pendant bien des années les
bateaux d'York et de grandes péniches supplémentent le service
à vapeur. Tout de même, avec le temps le besoin pour la main
d’œuvre s’amenuise, et les gens du lac se replient vers d’autres
sortes de gagne-pain. Certains qui étaient resté dans le
commerce des fourrures, se mettent à l’élevage de bêtes pour
leur peau, comme le renard et le vison, les nourrissant du
poisson du lac ; d’autres travaillent à divers gagne-pain : les
foins, l’agriculture, la pêche. D’autres poursuivent leur vie dans
la forêt boréale à la chasse des pelleteries ou deviennent
pourvoyeur.
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